Du style de Noursoultan Nazarbayev.
L’épithète qui caractérise le mieux N. Nazarbayev est « homme malhonnête ». Il a tendance à créer des groupes de personnes à qui il fait faire le serment de sang pour l’assurer de leur allégeance et de leur fidélité envers lui, le Leader. Cela étant, ce qui le caractérise surtout c’est le mépris total de la parole donnée à quelqu’un. Nazarbayev a plusieurs fois manqué à sa parole. D’après les experts, son trait de génie est de savoir exploiter son grand principe : tout doit être fait pour lui et pour les membres de sa famille.
Il ne s’embarrasse pas trop de savoir si ce qu’il fait est politiquement correct en tirant profit de sa situation pour récompenser les plus importants parmi ses amis et ses conseillers d’une part, pour punir ses ennemis de l’autre part. Le faisant il est sans pitié, c’est un fou du pouvoir qui sait bien utiliser le pouvoir politique pour avoir toujours plus de biens, d’avantages et de plaisirs. Il est incapable de respecter les succès des autres, d’être à l’écoute des besoins de la population qui cherche son soutien. Lorsqu’on le décrit comme un homme d’Etat plurivectoriel, on fait allusion à son manque de convictions personnelles, de principes utiles pour la société.
Ce qui caractérise Nazarbayev et les représentants de son énorme clan, c’est leur besoin de jaser, de casser le sucre sur le dos des autre, de médire. Tout cela est typique pour l’ère Nazarbayev : si on s’allie ici, c’est toujours contre quelqu’un. De plus en plus de personnes venant de l’entourage des Nazarbayev sont entrainés dans ses petites guerres mesquines qui tout à coup prennent de l’envergure pour céder place à une confrontation globale avec les victimes du président.
Incapable d’être reconnaissant, Nazarbayev compense ses complexes et ses peurs pathologiques par tous les moyens qui lui permettent de se magnifier lui-même et de rabaisser et d’humilier les autres. Il exige que ses mérites soient reconnus par la communauté internationale mais n’arrive pas à cacher son côté agressif. Il est évident que Nazarbayev, comme l’expliquent généralement des psychanalystes, a tendance à haïr les autres, à être agressif, qu’il a des pulsions destructrices, qu’il a besoin de s’affirmer sur le dos des autres.
Cela fait penser à l’année 1937 qui est associée au début des répressions politiques lancées par J. Staline qui déclarait que, « combattant le trotskisme moderne, il faut oublier les moyens dépassés comme la discussion pour utiliser les méthodes nouvelles, – celles d’extirpation et d’écrasement». En fait, une tâche bien précise avait été fixée devant le NKVD (« Commissariat du peuple aux Affaires intérieures », police politique, – n.d.l.t.) : celle d’exterminer les « ennemis du peuple ».
Ce sont les soi-disant « troïkas » qui étaient devenues des instruments majeurs de ces répressions. Une « troïka » type comprenait un chef de la section locale du NKVD, un dirigeant du parti communiste (VKP(b) et un procureur. En tant qu’organe extrajudiciaire, les « troïkas » avaient été constituées par une circulaire de l’OGPU (Direction Politique d’État, – n.d.l.t.), élaborée au sein de l’appareil central de cette Direction, elles étaient censées mener une instruction préparatoire dans les affaires liées aux « éléments antisoviétiques ».
En ce qui concerne V. Lénine ou J. Staline, ces dictateurs-là étaient des héros de la révolution, il leur arrivait de se tromper mais ils ont toujours agi pour le bien du peuple et ne se sont jamais enrichi grâce au pouvoir qu’ils avaient.
Ce qui différencie les dictateurs des temps modernes de ces personnalités historiques, c’est leur cupidité. L’exemple de Noursoultan Nazarbayev, Leader de la Nation, est très représentatif pour notre époque : craignant qu’une vengeance légitime ne le rattrape, craignant de perdre la fortune amassée par sa famille, il utilise les ressources publiques pour combattre la liberté de l’expression au Kazakhstan et pour lutter contre ceux qui s’opposent à son régime politique.
L’article signé par un journaliste français est très révélateur, il illustre à merveille la manière dont le style du gouvernement de ce dictateur kazakhstanais qui n’a rien d’un grand est perçu par la société occidentale.
Imaginée dans les années 60 par Nikita Khrouchtchev sous le nom soviétique de Zélinograd pour remplir un espace de terres défrichées, Astana est appelée par certains – non sans ironie – le Manhattan des steppes. Fruit du talent des plus célèbres architectes de la planète, la capitale du Kazakhstan apparaît cependant au visiteur comme une somme incroyable et colossale de folies de nouveau riche, posée au milieu de rien. Ou plus exactement au centre de l’immensité désertique d’un pays six fois grand comme la France.
Démesurée, Astana est comme un cauchemar de béton, un mauvais pastiche futuriste, un décor de film de science-fiction…
Un immense immeuble en forme d’arc de triomphe, siège de la compagnie nationale du pétrole, KazMunaiGaz, orgueil et symbole de la richesse du Kazakhstan, ouvre en fanfare la perspective sur deux kilomètres d’esplanades. On ne sait pas trop pourquoi, le peuple a surnommé cet immeuble « élévateur ». En haut de la tour Baïterek – 97 mètres, pour évoquer l’année de création de la nouvelle capitale – la main du président est gravée dans une plaque d’or.
Il est vrai qu’il tient le pays entier dans sa présidentielle main, par ailleurs reproduite sur tous les billets de banque. Chaque visiteur peut glisser sa propre main dans cette empreinte d’or, avant de découvrir le décor kitsch à souhait, et tout à fait stupéfiant, qui s’offre à ses yeux : le palais présidentiel Ak Orda, réplique de la Maison Blanche de Washington, agrémenté d’un dôme bleu, le Palais de Pékin, un immense palace aux toits recourbés comme ceux des pagodes, la grande mosquée toute blanche et coiffée d’or, la Pyramide du Palais de la Paix et de l’Harmonie, la colonne du Kazak Yeli ( « le pays Kazakh ») au sommet de laquelle est posé un aigle d’or, alors qu’à sa base veille, sous la forme d’une statue en bronze de cinq mètres, le président et chef de la Nation….
Plus que l’œuvre des grands architectes commandités pour la bâtir, Astana est la réalisation d’un fantasme, la traduction de l’architecture mentale de son promoteur, le président Noursoultan Abichevitch Nazarbayev, qui règne en maître absolu sur cet état géant de l’Asie centrale, peuplé par seulement seize millions d’habitants, disséminés des contreforts de l’Oural, aux confins de l’Europe, à la frontière de la Chine et de la Russie.
Astana n’est qu’une façade trompeuse pour quiconque s’y attarde un peu : une de ces idées de mauvais goût qui naissent dans le cerveau de certains milliardaires incultes quand ils se mettent à confondre leur mégalomanie avec une vision du monde.
Habitée par les fonctionnaires et les membres du gouvernement, qui ont pour la plupart laissé leur famille à Almaty, à trois heures d’avion, la capitale a la particularité, vue sa situation géographique, d’être tout simplement invivable. Comme le régime son auguste géniteur, « Nazarbayevcity – Astana » est une antichambre de l’enfer : il n’y a rien à y faire en dehors des heures de bureaux – la seule distraction, ce sont les galeries marchandes – mais surtout, les conditions climatiques y sont épouvantables.
Jadis, Staline avait installé des bagnes dans cette région glacée. A la place de la ville d’aujourd’hui, il y avait un village dont le nom, « La tombe blanche » impressionnait même les caravaniers, qui l’évitaient autant que possible. Le vent y souffle en permanence, avec une violence telle que tout être humain peut être emporté, et qu’un sentiment de catastrophe imminente vous saisit tant le bruit de tonnerre qu’il fait est assourdissant. En hiver, les tempêtes de neige, par une température dépassant les quarante degrés sous zéro, annihilent toute velléité de sortie.
La capitale du Kazakhstan n’est qu’une steppe marécageuse avec des gratte-ciel, que Nazarbayev a bâtie, dit-on, parce qu’il trouvait Almaty trop proche de la frontière chinoise. Peut-être a-t-il vu, aussi, dans l’isolement de sa capitale et de son gouvernement, un inexpugnable refuge pour son pouvoir : il faut une heure et demie en avion pour venir d’Almaty à Astana…
La République du Kazakhstan, autrefois république de l’Union soviétique, n’a connu qu’un seul président depuis 1990. Successivement Président du Conseil des ministres de la République socialiste soviétique kazakhe (entre 1984 et 1989), Premier secrétaire du parti communiste kazakh de 1989 à 1991, Noursoultan Nazarbayev n’a plus quitté le pouvoir depuis l’indépendance de son pays. Seul candidat en lice, il fut élu dès 1990.
Cinq fois par la suite, selon un calendrier électoral à géométrie variable, dicté par son seul caprice, il a remporté l’élection présidentielle, avec des scores … soviétiques : le dernier scrutin, en 2011, l’a vu triompher avec 95,5 % des voix. Ses trois concurrents, membres comme il se doit de la majorité présidentielle – il n’y a pas un seul député d’opposition au parlement – ne se sont pas contentés de voter pour lui. Deux d’entre eux, le communiste Akhmetbekov, et le sénateur Kassymov, se sont prononcés publiquement pour la prolongation du mandat de Nazarbayev jusqu’en 2020. On comprend le conseiller et porte-parole du président, qui a qualifié cette élection « de la plus idéale de toute l’histoire du Kazakhstan ».
Après s’être octroyé un oscar de popularité – « … nos concitoyens approuvent le travail que j’ai fait ces vingt dernières années », – a-t-il lui-même déclaré, – il s’est laissé aller dès le lendemain de la victoire à quelques commentaires empreints de pédagogie à l’usage des éventuels sceptiques, se posant en modèle pour l’Occident :
« Plus de 90 % pour un candidat, c’est à dire moi, a-t-il déclaré sans rire, – cela fait bien sûr sensation dans les Etats occidentaux… Nous avons montré que nous étions unis, alors qu’en général les élections divisent les pays et les peuples en factions partisanes ».
Une conception de l’unité nationale que n’a pas cautionné l’OSCE (Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe), soulignant que cette élection, tout comme les précédentes, n’a pas été « une véritable élection démocratique ». « Les « nombreuses irrégularités… signatures identiques sur les listes électorales…bourrages d’urnes… comptage des suffrages… tout cela « manquait de transparence », les médias opérant « dans un environnement restrictif induisant l’autocensure », ont noté les observateurs de la commission électorale dans leur rapport. Un rapport soutenu par l’ambassadeur des Etats Unis à Astana, qui s’est empressé par ailleurs de féliciter officiellement le vainqueur.
Il faut signaler en passant que, grâce sans doute à son pétrole et à son uranium (dont le Kazakhstan est le premier producteur mondial), et donc au poids politique que cela lui confère, le Kazakhstan a hérité pendant l’année 2010 de la présidence de cette même OSCE, si critique à son endroit un an plus tard.
Nazarbayev ne s’en soucie guère : à 70 ans passés, il a assuré son avenir jusqu’à la fin des temps, en s’autoproclamant « Elbassy » (« leader de la Nation » en kazakh), statut qui lui garantit de pouvoir décider à vie des grandes orientations politiques de la nation, ainsi qu’une immunité perpétuelle. Sa devise, comme celle de tous les autocrates: on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Il jouit à l’étranger, non pas sans doute d’une réputation de démocrate, mais de relations qui lui donnent le sentiment d’être devenu intouchable. Il s’entend à merveille avec le russe Vladimir Poutine, avec ses voisins d’Ouzbékistan, du Turkménistan et du Kirghizstan, avec les Turcs, qui lui ont érigé une statue en plein centre d’Ankara, et gère au mieux ses relations avec le mastodonte chinois, dont il se méfie, tout en lui envoyant par gazoduc terrestre une partie de ses besoins en énergie.
Pour quinze millions d’euros par ans, il a recruté pour sa communication internationale l’ex-Premier ministre britannique Tony Blair, et son partenariat privilégié avec la France lui a permis d’être reçu, puis visité à plusieurs reprise par Nicolas Sarkozy, alors locataire du palais de l’Elysée.
Il n’ y a aucun doute qu’il crut sur parole le conseiller du président de la république française Claude Guéant, qui salua en octobre 2007, au cours d’un dîner où les grands patrons français entouraient leur invité d’honneur Nazarbayev « sa vision » de chef d’Etat, et son pays, « ilot de stabilité et de tolérance ». Il est vrai que le « partenariat privilégié » du Kazakhstan avec la France, voulu par Nicolas Sarkozy, fait le bonheur des grandes entreprises françaises comme Total, GDF-Suez (hydrocarbures), EADS (hélicoptères et armement), Areva (Nucléaire), ou Alstom (trains). Toutes ont récoltés de juteux contrats à Astana.
Sur fond d’enjeux économiques majeurs, le show Nazarbayev continue : ce pourrait n’être qu’une farce, digne d’une bande dessinée, ou d’un film de Chaplin : le chef de l’Etat est l’auteur de l’hymne national de son pays, et il fut le seul digne – à ses propres yeux – d’être le porteur de la flamme olympique lorsqu’elle traversa le Kazakhstan…
Mais la mascarade cache une face plus sombre, lorsqu’on connaît la très dure réalité à laquelle s’exposent tous ceux qui ont tenté de s’opposer à lui, ou ont seulement le tort d’en connaître trop les secrets. Et le prix que payent les habitants de ce pays multiethnique et multiconfessionnel, à majorité musulmane, à ce régime politique. Alors qu’ils devraient être tous, vu leur petit nombre, comme au Koweït, aisés, ou riches, si la redistribution des richesses existait, la plupart vivent dans le dénuement. Au Kazakhstan, la classe moyenne n’existe quasiment pas. Il y a les riches – la minorité – au milieu de la grande multitude des pauvres.
Au commencement de son règne, Noursoultan Nazarbayev montrait de bonnes et saines intentions, selon certains témoins de son parcours. Il critiquait ouvertement et courageusement les anciens cadres du parti, développait des idées et une pratique démocratique qui lui attiraient le soutien de tous les milieux.
Pour d’autres, il semble avéré que le vers était dans le fruit dès le début de l’ère libérale. La société pétrolière américaine Chevron, conseillée entre autres par Condoleezza Rice, sut se montrer généreuse et versa à Nazarbayev, sur des comptes suisses, la somme de cent millions de dollars, pour l’acquisition des droits d’exploitation du gisement de Tengiz. Ce « Kazakhgate » fit en son temps quelque bruit, puis fut vite relégué aux oubliettes.
Dans la première période post-soviétique, le passage à l’indépendance, à un régime démocratique, et à une économie libérale s’annonçait tout de même, globalement, sous de bons auspices. Le problème est venu de l’explosion d’une économie enfin libérée du carcan communiste, qui a généré d’énormes profits, et surtout fait apparaître des chefs d’entreprises riches et puissants. Ils échappaient au pouvoir politique, qui devenait dépendant d’eux.
Nazarbayev a très mal vécu cette perte de contrôle sur des pans entiers de l’industrie, et de l’économie dans son ensemble. Tout autant qu’il s’est mis à jalouser les fortunes qui se faisaient autour de lui. S’est-il senti, d’homme à homme, en état de faiblesse face à certains capitaines d’industrie ? Il ne l’a sans doute pas supporté. Il fallait qu’il devienne plus riche qu’eux, pour être plus puissant qu’eux, leur imposer sa volonté, et devenir le vrai, le seul patron. Il est désormais plus que cela : un véritable caïd, à la tête d’une famille et d’un clan sans scrupule.
Pour résumer cette transformation de leaders politiques en prédateurs financiers, le Grand Maître d’échecs russe Kasparov, opposant à Vladimir Poutine, dit un jour dans une interview à la presse kazakhe :
– « Le point commun entre nos dictateurs post-soviétiques, c’est qu’ils rêvent tous de ressembler à Staline, tout en voulant devenir aussi riches que Bill Gates.»
Autour de Nazarbayev et du culte de sa personnalité, sa famille l’a poussé, encouragé, et même parfois manipulé, dans le sens de la cupidité la plus absolue. Chacun des membres de cette terrible famille s’est montré plus avide que son voisin, et l’escalade dans la course à l’argent a balayé tous les principes, repoussé toutes les limites. Entre eux, c’est une compétition effrénée pour la mainmise sur Nazarbayev. Gérer cette continuelle crise familiale, ses jalousies, ses excès, prend un temps fou au président, au détriment de la gestion de l’Etat.
Ne dit-on pas qu’il a choisi d’installer son gouvernement, toute l’administration, et son propre palais à Astana pour échapper au harcèlement de sa famille (restée à Almaty), qui en fait un homme sous influence ?
Il doit aussi manager sa vie extraconjugale, car ce grand séducteur collectionne les maîtresses, dont une ex-hôtesse de l’air de son avion privé, et une ex-Miss Kazakhstan, des jolies femmes dont il a eu des enfants, et qui ont aussi leurs exigences. Les filles de Nazarbayev profitent aussi de chaque frasque de leur père pour lui soutirer un peu plus d’avantages ou d’argent, quand celui-ci quête leur indulgence.
Maintenant qu’il a réussi à regagner un semblant d’autonomie, il doit aussi faire face à la lutte des clans d’affairistes qui rivalisent autour de lui.
Aucune possibilité en tout cas de faire une quelconque affaire importante sans donner sa part à ce consortium familial et clanique, qui a fini par gérer le pays comme une propriété privée.
Le partage du gâteau a octroyé le secteur des médias et de la publicité à Dariga, celui du bâtiment et de la construction à Aliya, la benjamine, alors que la cadette Dinara, la préférée de Nazarbayev, est aussi la plus riche, et la plus influente, avec son mari Timur Kulibayev, un oligarque multimilliardaire spécialisé dans le pétrole et le gaz, très proche du président.
Le couple a récemment défrayé la chronique en Suisse, dans le canton de Genève exactement, où Dinara réside. Elle y a acquis avec son mari une somptueuse propriété de 7960 m2 à Anières, pour la modique somme de 74, 7 millions de francs suisses.
En 2006, déjà, Timur Kulibayev avait déjà semble-t-il acheté dans le Tessin, près de Lugano, un magnifique manoir du 19eme siècle, la Villa Romantica, par l’intermédiaire d’une de ses relations d’affaires, un homme connu en Suisse pour avoir fait l’objet d’une enquête pour blanchiment d’argent. La villa Romantica, après investigation, apparut comme étant la propriété d’une société off shore domiciliée à Tortola, dans les îles Vierges, représentée par Behgjet Pacolli, un businessman originaire du Kosovo ami des Nazarbayev.
La famille possède des villas et des propriétés dans le monde entier, et en particulier à Londres, ou dans le sud de la France.
Le clan Nazarbayev, sous les yeux du peuple médusé, s’est mis à tout accaparer, à confisquer les richesses nationales, à se partager les milliards, à se déchirer. Des luttes mesquines de petits bourgeois grisés par leur fortune.
Une saga d’Asie centrale, aux dimensions d’un Etat gigantesque -traversé par une seule grande route – et de richesses sans limites. Dans un pays où l’élite marche ou crève, et où le peuple, dépossédé de son destin, assiste de loin, impuissant, au feuilleton vrai de l’opulente décadence d’une famille, et à l’échec d’un régime.
La vie ne s’est en effet pas améliorée, aucun avenir n’est offert à la jeunesse, hors les préceptes édictés par la Première dame, Sarah Nazarbayev, présentée comme « la mère de tous les enfants du Kazakhstan », dans un livre qu’elle n’a pas écrit, mais signé, qui est distribué et enseigné dans les écoles : on y apprend en gros que l’argent n’est pas la chose la plus importante dans la vie, qu’il ne faut compter que sur soi, et donc travailler à bien se connaître.
Des conseils d’une grande sagesse, s’ils ne sont pas d’une originalité ni d’une nouveauté indiscutables. Des conseils assez surprenants aussi, lorsqu’on connaît la philosophie en usage dans la famille de Sarah Nazarbayeva… Elle dirige une fondation pour l’enfance, aux comptes opaques, où il est de bon ton pour l’étranger en quête de contrats, d’y verser une obole.
Le maintien d’un pareil système ne va pas sans l’emploi de l’intimidation, de la force, voire pire. En décembre 2011, dans l’indifférence générale de l’Occident pourtant attaché au droit d’expression, au droit de grève, et à tous les droits des salariés, les ouvriers du pétrole de Zhanaozen ont subi lors d’une manifestation une répression sauvage, sanglante. Les forces de police ont tiré à balles réelles sur les manifestants, faisant plusieurs dizaines de morts et de blessés. Une hécatombe filmée et diffusée sur le net, sans que la communauté internationale s’en soit émue plus que cela.
D’autres affaires plus mystérieuses ont entaché le régime ces dernières années, sous la forme d’assassinats suspects, de disparitions soudaines d’opposants, ou de personnages en disgrâce : Zamanbek Nourkadilov, ou Altynbek Sarsenbayev ministre de la Presse devenu opposant tué à bout portant dans les environs d’Almaty par des militaires qui avaient arrêté sa voiture, en février 2006. Le premier décès suspect, celui de Mr Abischev, un lointain parent de Sara Nazarbayeva, s’était produit sur le yacht du président – et en présence de celui-ci. Il aurait été violemment frappé et en serait mort sans que l’on en sache jamais plus. Début juin 2012, c’est Takhir Moukhamedzianov, un syndicaliste très actif qui est retrouvé mort, puis, le 15 de même mois, sont arrêtés Janbolat Mamaï et Bolat Atabaev, accusés d’avoir provoqué des désordres publics à Zhanaozen. Leur avocat s’est vu proposer par les autorités une intéressante collaboration contre l’abandon de la défense des deux « rebelles ». Il se serait agi de « mouiller » le banquier Ablyazov, lâché par le régime.
Le rideau opaque qui occultait la gouvernance très particulière du patron du Kazakhstan a commencé à se déchirer avec la chute de Rakhat Aliev, l’ex-mari de Dariga, la fille aînée de Nazarbayev. Il fut limogé en 2007 de son poste d’ambassadeur à Vienne, pour avoir, selon l’accusation, comploté contre son beau-père, et « mené des activités criminelles » lui faisant encourir dans son pays des peines allant jusqu’à 40 ans de prison. Aliev a publié depuis un livre en Allemagne « Godfather in Law » (« le Parrain était mon beau-père ») où il a dévoilé tout ce qu’il sait de la vie et des œuvres de Narzarbayev et de son clan. Des révélations sur les comptes en banque, les sociétés, les trafics en tous genres, les mœurs, etc. Des révélations aussi sur la psychologie et l’agressivité de Nazarbayev, qu’il attribue à la peur constante dans laquelle vit son ex-beau-père. Une peur devenue pathologique au fil des années.
Rakhat Aliev a été suivi de près sur la route de l’exil par Moukhtar Ablyazov, un grand financier. Nazarbayev voulait cannibaliser sa banque, la BTA Bank, sous prétexte qu’il le soupçonnait de vouloir se servir politiquement de sa puissance financière contre lui pour le renverser. Devant les hésitations du banquier, qui tenait à rester à la tête de ses affaires pour honorer ses engagements, notamment envers d’importantes banques étrangères, Nazarbayev a fait prendre possession manu-militari par des troupes encagoulées de noir les locaux de la BTA Bank qu’il convoitait. Il a ensuite accusé Ablyazov de détournements et de divers autres méfaits. Réfugié à Londres, celui-ci s’est ensuite enfui plus loin, pour tenter de se défendre, et mener le combat contre le président kazakh. Il est en particulier accusé par le pouvoir kazakh – Ablyazov nie formellement toute implication- d’être à l’origine de la divulgation d’informations sur d’énormes sommes d’argent cachées en Suisse par le potentat et sa famille. Les autorités suisses ont d’ailleurs bloqué une somme de 600 millions appartenant aux Nazarbayev.
Les retombées de l’affaire Ablyazov sont nombreuses, et frappent tous ceux qui sont soupçonnés d’être ses alliés. Ainsi la famille Khrapunov.
Dans une interview accordée à un magazine suisse, Amanzhol Zhankuliev, l’Ambassadeur du Kazakhstan en Confédération helvétique, au Lichtenstein et au Vatikan, représentant permanent de la République du Kazakhstan auprès du Bureau européen de l’Organisation des Nations Unies et des autres organisations internationales, a ainsi répondu à la question du journaliste sur l’objectif du programme d’Etat « La voie vers l’Europe, 2009-2011 » adoptée par N.Nazarbayev :
«L’objectif principal du programme est de faire accéder le pays au niveau du partenariat stratégique avec les pays européens en vue d’augmenter considérablement les échanges, de réaliser des projets communs en matière de développement du réseau de transports, d’actualiser et de mettre les règlements techniques et les standards en conformité avec les exigences de l’UE, d’améliorer la législation du Kazakhstan compte tenu des normes de droit européennes. Le programme doit contribuer au développement du principe de base de la politique extérieure de la République du Kazakhstan : « Equilibre et pragmatisme ». Grâce au Programme approuvé par Noursoultan Nazarbayev, Président du Kazakhstan, notre pays saura approfondir la coopération avec les ministères helvétiques concernés dans les domaines tels que protection de l’environnement, santé publique, production et réalisation (importation et exportation) de produits agricoles, de l’information scientifique et technique ainsi qu’harmoniser le systèmes d’assurances du Kazakhstan et celui de la Suisse en matière de responsabilité civile des propriétaires de véhicules.
Dans les déclarations de N. Nazarbayev et celles de l’Ambassadeur du Kazakhstan en Suisse ne sont pas mentionnés les projets liés à la coopération en matière du développement des processus démocratiques, à la mise en place des institutions de la société civile, à la protection sociale pour tous les citoyens du Kazakhstan, au développement et au soutien de la liberté de l’expression au Kazakhstan, aux problèmes de la libéralisation de la législation pénale, à la mise des actes législatifs en conformité avec les normes européennes.
Je considère que mon objectif principal est d’effectuer un travail d’analyse nécessaire pour étudier tout ce qui n’a pas pu être réalisé au Kazakhstan pendant que Nazarbayev est au pouvoir. Je m’engage à organiser et à animer des discussions importantes pour les citoyens du Kazakhstan, ceci avec l’aide des organisations internationales et des organismes suisses de défense des droits de l’homme et des citoyens qui souhaitent soutenir la population qui est aujourd’hui littéralement fusillée par le régime de Nazarbayev.
Mon but est de contribuer à l’établissement des relations humaines entre les pays de l’Union européenne et les gens simples au Kazakhstan, des professionnels travaillant dans des domaines différents. Une de mes priorités sera de fournir à la population une information objective au sujet du style et des méthodes du gouvernement de N. Nazarbayev qui violent les droits des citoyens du Kazakhstan.
En analysant les documents, mes camarades qui partagent mes idées et moi, nous étudierons avec attention l’histoire et les résultats de la privatisation des entreprises publiques du secteur pétrolier et gazier, énergétique, de l’industrie sidérurgique et de la métallurgie non ferreuse, de l’industrie des minerais et de l’agriculture.
Nous étudierons l’histoire de la privatisation du secteur bancaire, notamment celle de la privatisation par Timur et Dinara Kulibayev de la Banque Populaire du Kazakhstan, l’institution bancaire la plus ancienne de la République du Kazakhstan qui a presque 100 ans d’histoire.
Nous analyserons l’histoire de la privatisation de l’infrastructure et des moyens logistiques du Gostéléradio (compagnie nationale de radio–télévision) du Kazakhstan en faveur de la SA Khabar qui appartient à Dariga Nazarbayeva et à Noursoultan Nazarbayev, ainsi que les assassinats des témoins de cette histoire.
Nous accorderons une attention particulière à la « Fondation Noursoultan Nazarbayev pour l’éducation» pour étudier les sources de financement de cette structure et voir comment elle investit à son tour dans les écoles privées et les universités appartenant à Dinara Kulibayeva.
Un autre sujet très intéressant qui méritera toute notre attention est l’activité d’Aliya Nazarbayeva, reine de la construction.
A l’attention de ceux qui consultent mon site je propose neuf diagrammes reflétant des activités criminelles de Nazarbayev et de son entourage ainsi qu’une liste non exhaustive des biens appartenant aux Nazarbayev. Si vous avez à votre disposition d’autres faits ou informations, n’hésitez pas à me les faire parvenir : cela permettrait d’élargir et de détailler les schémas déjà publiés sur le site et d’en élaborer de nouveaux qui révèleront d’autres actes criminels commis par le clan Nazarbayev et son entourage proche.